Le 23 septembre, pour ce premier jour de l'automne, la France Insoumise a fait resurgir la force populaire que des millions de citoyens lui ont donné au printemps. C'est la première fois dans l'histoire de la 5ème République qu'une manifestation politique aussi massive a lieu contre un gouvernement et un Président installés depuis aussi peu de temps. Voir une telle vague se lever contre soi à peine quatre mois après avoir été élu est un signe civique que ce pouvoir devrait prendre très au sérieux.
Les revenants du chiraquisme qu'il a recyclés au gouvernement devraient lui rappeler qu'en novembre-décembre 1995, un mouvement social et civique de masse visant aussi des ordonnances de droit social avait déjà ébranlé un pouvoir «?droit dans ses bottes?» en tout début de mandat. Au point de lui être fatal dans les urnes à peine un an et demi plus tard au printemps 1997.
Car contrairement à ce qu'a affirmé le président Macron, il n'y a pas de contradiction en France entre la rue et la démocratie. Là encore la mémoire semble manquer au nouveau pouvoir. Toute l'histoire démocratique de la France a été rythmée par des mobilisations populaires de rue du plus petit village à la plus grande ville, et en particulier par de grandes marches entre les places de la Bastille et de la République. Ces mobilisations républicaines sont même devenues un garant de la démocratie à chaque fois que la légitimité des institutions était en cause. Et elles le sont plus que jamais dans l'édifice vermoulu de la 5ème République, dont le locataire actuel n'a reçu aucun vote d'adhésion à son projet.
Quand il dit que cette marche est un commencement et pas une fin, Jean-Luc Mélenchon se fait un meilleur poumon du peuple qu'un président qui donne des leçons en anglais sur CNN à ses concitoyens présumés fainéants. La mobilisation va se poursuivre sous de multiples formes et à de multiples occasions démocratiques puisque le gouvernement mijote encore des décrets d'application de ses ordonnances. Et que ces dernières reviendront de toute façon devant le Parlement qui aura donc le pouvoir de les invalider par la loi. Quels que soient les choix des appareils politiques et syndicaux, la convergence de l'insoumission est en cours dans le pays contre ces ordonnances meurtrières pour ceux qui travaillent. Et plus le pouvoir actuel s'obstinera contre cette force du peuple dans la rue, plus il le paiera cher et rapidement dans les urnes.
Laurent Maffeïs
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